Un peu de tout et de tout un peu

Un peu de tout et de tout un peu

Préjudice d'Antoine Cuypers

Une belle maison bourgeoise dans un jardin entouré d'arbres. Le père qui apprête le barbecue aidé par son petit-fils en visite, la mère qui s'affaire avec sa fille et sa belle-fille en cuisine pour un repas de famille qui devrait être un moment de bonheur convivial comme toutes les familles aiment en vivre.  La fille a d'ailleurs une bonne nouvelle à annoncer à ses parents.  Le seul problème au départ semble être le retard du fils aîné qui travaille tellement que la famille a du mal à trouver le moyen de se réunir entre eux. Mais cette famille en apparence comme les autres est en souffrance extrême à cause de Cédric, un fils de 30 ans à la santé mentale fragile, dont tous les membres de la famille craignent les réactions. Cédric rêve de partir en voyage, il s'y  prépare, son père accepterait, sa mère par contre refuse que ce voyage se fasse.  Cédric se sent mal aimé entre son frère et sa soeur "normaux", il se sent frustré dans son désir de liberté et d'évasion, il n'accepte pas de ne pas être comme les autres, tout en revendiquant son droit à être différents ("tout le monde est différent de tout le monde"), et il souffre aussi de ne pouvoir exprimer sa sexualité, avoir une femme dont il puisse tenir la main comme son frère.  Alors que la soirée aurait dû tourner autour de la soeur de Cédric toute à sa joie d'annoncer qu'elle est enceinte,  pendant l'orage qui a gâché le barbecue, un orage intra-familial survient, Cédric provoque le drame en réclamant des excuses pour le préjudice qu'il subit.  

Thomas Blanchard joue le rôle de Cédric avec une conviction poignante.

Nathalie Baye est parfaite dans le rôle de la mère qui tout en cherchant à donner le change est autoritaire, possessive, et dure mais que l'on devine épuisée par  toute l'énergie qu'elle emploie à vouloir gérer et assumer seule une situation de plus en plus ingérable, refusant de lâcher du lest alors même que le rêve de Cédric leur permettrait à tous de respirer. Arno joue le rôle d'un père que l'on sent tout aussi épuisé, désabusé, désarmé, qui n'arrive pas à faire valoir son opinion, toutefois tendre et assez complice avec ce fils "différent" pour lui faire oublier sa différence. Il y a aussi la belle-fille perturbée par le désir d'elle que Cédric ne peut s'empêcher de lui manifester. Et le petit-fils assiste à tout ce drame qu'il contemple avec ses grands yeux d'enfant étonné.  

Un film qui se déroule dans un huis-clos et une atmosphère lourde comme le ciel avant un orage.  Un film construit comme une tragédie grecque avec l'unité de lieu, de temps et d'action et des personnages condamnés à un destin sans issue.  Une ou deux notes d'humour ne rendent pas plus harmonieuse la symphonie dissonante jouée par cette famille.

Le malaise général est très bien exprimé par les cadrages rapprochés des personnages autour desquels le décor est toujours flou, comme si l'univers autour des personnages n'existait pas, la sous-exposition lumineuse, les couleurs ternies et la musique ajoutent encore à la sensation de mal-être et d'étouffement . 

 



23/01/2016
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